Comment l’Azerbaïdjan a tissé sa toile au cœur de la classe politique française

ENQUÊTE. Alors que l’Arménie continue de lutter contre la coalition turco-azérie qui la prend en étau, Bakou étend son réseau d’influence… tout particulièrement en France et au sein de la classe politique française.

La dictature azérie a un bilan déplorable. Dictature autoritaire avec une corruption institutionnalisée citée dans les panamas et les pandora papers, liée à un régime turc en plein hubris expansionniste islamonationaliste, cachant mal son discours de haine assumé envers les arméniens (qualifiés par Aliev de « chiens »), elle semble avoir peu de moyens de se créer des amitiés politiques. Pourtant elle dispose du soutien politique d’élus et de sénateurs français. Enquête

Les membres politiques structurant les réseaux pro-azéris en France

Les réseaux d’influence de l’Azerbaïdjan en France se structurent en grande partie via l’Association des Amis de l’Azerbaïdjan (AAA). On retrouve par exemple au sein du conseil d’administration de l’AAA l’ex-garde des sceaux Rachida Dati, la sénatrice de l’Orne Nathalie Goulet ; le sénateur du Haut-Rhin Jean Marie Bockel ; et Thierry Mariani, familier de l’Azerbaïdjan, pays où il développe une activité d’apporteur d’affaires et qu’il soutient toujours. Cette association inclut également Patrick Gendraud, président du Conseil Départemental de l’Yonne ou encore Michel Gourinchas ancien maire de Cognac, Alain Houpert sénateur et André Villiers député ainsi que François Grosdidier maire de Metz.

On peut noter qu’en dehors du maire de Cognac qui était au PS, l’Azerbaïdjan semble essentiellement cibler des élus de droite. Cela peut s’expliquer par le fait que le discours islamo-nationaliste turc a généralement peu d’affinités avec la gauche en Europe du fait de sa forte hostilité à la gauche turque alternative au kémalisme. En outre l’Azerbaïdjan utilise une logique top-down de ciblage des élites qui marche mieux avec des partis de notables (on peut typiquement penser à l’UDI). Enfin, il y a historiquement des liens entre la gauche et la cause arménienne en France (remontant à l’engagement de Jaurès) qui même si ils ont tendance à se distendre chez un certain nombre de mouvements à gauche (expliquant le silence d’une partie de la gauche qu’évoque cette tribune) peuvent encore empêcher des liens avec Aliev. Cependant, le régime d’Aliev garde des contacts avec le PS typiquement via Jérôme Lambert, élu de la Charente rattaché au parti socialiste et petit-neveu de François Mitterrand. Cela  a garanti la vente à l’Azerbaïdjan de satellites d’observation optique (pouvant avoir un usage militaire) sous la présidence de François Hollande d’autant que l’Azerbaïdjan sait aussi utiliser une diplomatie économique via l’accès à son marché. . On peut penser que l’Azerbaïdjan n’a donc pas essayé d’avoir des contacts plus à gauche en se disant que les partis en question n’auraient aucune chance d’accéder au pouvoir (plus à droite, le seul contact actuellement au RN de l’Azerbaïdjan, Thierry Mariani a des liens avec l’Azerbaïdjan remontant au moment où il était à l’UMP même si on peut noter qu’il a gardé un soutien indéfectible à la dictature d’Aliev dans sa trajectoire politique)