Dans un rapport de 28 pages rendu public ce 8 août, Luis Moreno Ocampo, ancien procureur général de la Cour Pénale Internationale (CPI) a estimé que “Le blocus du corridor de Lachine par les forces de sécurité azerbaïdjanaises, qui empêchent l’accès au Haut-Karabagh de toute nourriture, de tout matériel médical et d’autres produits de première nécessité […] devrait être considéré comme un génocide contre les Arméniens ethniques du Haut-Karabakh en vertu de l’article II, (c) de la Convention sur le génocide : « Le fait d’infliger intentionnellement au groupe des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique »”.
Luis Moreno Ocampo avait été le premier procureur de la CPI de 2003 à 2012 qui, sous son mandat, a instruit les crimes contre l’Humanité commis en Ouganda, en République démocratique du Congo, en République centrafricaine et au Darfour. Ce spécialiste incontesté du droit pénal international avait été sollicité le 29 juillet dernier par Araïk Haroutiounian, le Président de la libre République d’Artsakh (Haut-Karabagh) à propos du blocus total opéré par la dictature Aliev à l’encontre de son peuple.
La requête du Président Haroutiounian sollicitait Luis Moreno Ocampo pour déterminer si “le blocus [de notre peuple] par l’Azerbaïdjan depuis le 12 décembre 2022, et surtout le blocage de toute forme d’assistance humanitaire au Haut-Karabagh mis en œuvre depuis le 15 juin 2023, constitue le crime de génocide” et lui demandait également son avis sur la compétence en la matière de la Cour Pénale International et sur les responsables qui pourraient être personnellement poursuivis.
La réponse de M. Ocampo ouvre la porte à des poursuites pénales à l’encontre du sanguinaire dictateur azerbaïdjanais et de ses complices. Dans son argumentation, M. Ocampo souligne “qu’il n’y a pas de fours crématoires, ni d’attaques à la machette. La famine est l’arme invisible du génocide. Sans changement radical immédiat, ce groupe d’Arméniens sera détruit dans quelques semaines”.
“Vu l’urgence critique de la situation, vu les prises de positions réitérées de hautes autorités morales et politiques que celle de M. Ocampo vient parachever, nous ne comprendrions pas que la Cour Pénale Internationale n’ouvre pas a minima une enquête et qu’elle n’émette pas un mandat d’arrêt international contre le Président Ilham Aliev”. a déclaré François Pupponi, le Président du Cercle d’Amitié France-Artsakh.
La prise de position de M. Ocampo arrive en effet juste après celle, réitérée ce 7 août, d’un groupe d’experts de l’ONU qui soulignent que “le blocus du corridor de Lachin entraîne de graves pénuries de denrées alimentaires essentielles” et que “la région avait épuisé ses réserves médicales” pour exhorter “les autorités azerbaïdjanaises à rétablir immédiatement la libre circulation des personnes, des véhicules et des marchandises dans les deux sens le long du corridor de Lachine, conformément à l’accord de cessez-le-feu de novembre 2020”.
Ces derniers jours, des déclarations politiques et jugements similaires se sont multipliés devant la famine artificiellement provoquée par Bakou en Artsakh, telle celle de ce 1er août de trois parlementaires-clés du Parlement européen, la présidente de la délégation pour les relations avec le Caucase du Sud, Mme Marina Kaldjurand, le rapporteur permanent du Parlement européen sur l’Arménie, M. Andrey Kovatchiev et le rapporteur permanent du Parlement européen sur l’Azerbaïdjan, Mme Željana Zovko.
“Nous ne pouvons que souscrire aux demandes de ces parlementaires européens. Le temps n’est plus au parole. L’Union européenne doit mettre en œuvre des sanctions politiques et économiques rapides et concrètes contre le gang au pouvoir en Azerbaïdjan et elle doit aussi mettre en oeuvre des mesures humanitaires immédiates pour remédier au désastre annoncé en Artsakh” a souligné François Pupponi qui a indiqué que ces initiatives politiques “doivent venir en sus des poursuites pénales contre le criminel Ilham Aliev”.
La prise de position en forme de rappel des trois parlementaires européens survient également après celle exprimée le 28 juillet par Marija Pejčinović Burić, la Secrétaire générale du Conseil de l’Europe.
“Le constat politique et pénal est désormais unanime, du Conseil de l’Europe aux Etats-membres de l’Union européenne en passant par les institutions élues de l’Union, et désormais les experts en matière de droit de l’Homme de l’ONU et le premier procureur de la CPI. Le droit international a parlé et nous oblige tous à intervenir tant sur le plan des sanctions politiques que sur celui des sanctions pénales” a constaté François Pupponi. “Le Président Macron, qui bénéficie de surcroît de l’encouragement en la matière des deux Chambres, doit engager le mouvement. Les Arméniens d’Artsakh, au bord de l’extermination, ne peuvent plus attendre” a conclu le Président du Cercle d’Amitié France-Artsakh